Volcan
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| Sujet: Le devoir.com 13 juin 08 Complot à la pompe Ven 13 Juin 2008 - 21:08 | |
| http://www.ledevoir.com/2008/06/13/193824.htmlComplot à la pompeFrançois Desjardins Édition du vendredi 13 juin 2008Treize individus et onze entreprises sont accusés de complot criminel pour avoir fixé les prix de l'essenceL'image de l'industrie pétrolière, mise à rude épreuve par des prix qui ont explosé de 40 % depuis 2007, porte désormais la tache d'une enquête fédérale de deux ans qui s'est traduite hier par le dépôt d'accusations criminelles contre 13 personnes et 11 entreprises pour avoir fixé le prix de l'essence à Victoriaville, à Thetford Mines, à Magog et à Sherbrooke.
Il s'agit du premier cas de collusion à grande échelle depuis une affaire de concertation survenue à Vancouver en 1955. Depuis 10 ans, le Bureau fédéral de la concurrence a institué six enquêtes pour tirer au clair des allégations de collusion ou d'abus de position dominante, mais il n'a jamais découvert de regroupements secrets pour éviter des guerres de prix.
Usant de l'écoute électronique, de perquisitions et de son programme d'immunité judiciaire pour les collaborateurs, le Bureau a révélé hier que «des détaillants d'essence ou leurs représentants se téléphonaient et s'entendaient sur le prix demandé aux consommateurs pour l'essence dans les marchés visés».
Trois sociétés et une personne ont plaidé coupables hier devant la Cour supérieure du Québec à Victoriaville. Une amende de 179 000 $ a été imposée à Pétroles Therrien inc. (l'enseigne Pétro-T) et à Distributions pétrolières Therrien inc., tandis qu'Ultramar a écopé d'une amende de 1,85 million. L'individu est un employé d'Ultramar qui a été condamné à payer une amende de 50 000 $.
Douze personnes et huit entreprises n'ont pas encore soumis de plaidoyer, car elles n'ont pas encore comparu. La liste du Bureau de la concurrence énumère plusieurs petites entreprises et une grosse: Alimentation Couche-Tard, qui exploite dans les quatre zones 17 stations sous les enseignes Petro-Canada, Irving et Esso. Il a été impossible hier de joindre la direction de Couche-Tard.
Au grand total, 53 stations, qui portent aussi les enseignes Shell, Olco et Sonerco, ont été montrées du doigt par le Bureau de la concurrence. «Il est allégué que la grande majorité des détaillants d'essence dans ces [quatre] marchés ont participé au cartel», a affirmé le Bureau, qui n'a jamais vu de tel cas depuis une affaire de collusion à Vancouver en 1955.
Autres enquêtes
Le Bureau de la concurrence a précisé que d'autres enquêtes sont présentement en cours dans d'autres marchés au Canada mais a refusé d'avancer des détails. L'annonce aujourd'hui envoie un message très clair que le Bureau de la concurrence agit contre ceux qui fixent les prix lorsqu'il a la preuve que ces derniers ont contrevenu à la loi», a déclaré Sheridan Scott, commissaire de la concurrence.
Depuis le début des années 70, quelques enquêtes du Bureau ont révélé des incidents de collusion «isolés» dans la vente d'essence et de mazout, mais jamais à grande échelle. Après l'ouragan Katrina qui avait poussé les prix brièvement à 147 ¢ le litre à l'été 2005, le Bureau avait lancé une enquête mais n'avait trouvé aucun indice de collusion.
L'enquête dont les résultats ont été dévoilés hier a débuté en 2005 et s'est terminée en 2007. La durée des actes reprochés varie d'un cas à l'autre. M. Plouffe a précisé que, chez Pétro-T, par exemple, les faits ont été observés d'avril 2005 à avril 2006.
Plus de 100 000 documents ont été saisis, une preuve documentaire dont l'ampleur est nécessaire du fait que des accusations criminelles exigent la démonstration, non pas seulement d'une infraction, mais d'une intention.
Situation regrettable, dit Ultramar
À peine 45 minutes après le dévoilement des accusations, Ultramar a diffusé un communiqué pour indiquer que «l'enquête du Bureau de la concurrence a démontré qu'aucun membre de sa direction n'est impliqué dans le dossier ou n'était au courant des faits et gestes reprochés». Elle affirme aussi que les deux employés, qui ont été congédiés, «n'ont jamais été les instigateurs ni les coordonnateurs des ententes d'augmentation de prix» et qu'ils n'ont «tiré aucun avantage pécuniaire».
Ultramar, une filiale de la société américaine Valero Energy, a ajouté que les faits reprochés, dans son cas, ne se sont déroulés que du 3 mars 2005 au 23 juin 2005, et seulement dans deux secteurs, soit Victoriaville et Thetford Mines. En plaidant coupable, la compagnie a voulu éviter de longues procédures, a-t-elle affirmé.
«Il s'agit évidemment d'une situation regrettable que nous déplorons. Nous croyons, par ailleurs, que ces deux employés n'ont pas agi dans l'intention de nuire, mais plutôt par insouciance, sans tenir compte des règles établies et des conséquences de leurs gestes, a écrit Ultramar. Bien qu'Ultramar aurait pu évoquer un certain nombre d'arguments juridiques pour contester les accusations, nous avons conclu qu'il serait dans les meilleurs intérêts de tous de plaider coupable afin d'éviter un procès long et coûteux.»
L'Institut canadien des produits pétroliers (ICPP), qui regroupe toutes les grandes pétrolières, a refusé hier de commenter les mises en accusation, renvoyant les médias aux diverses personnes et sociétés faisant l'objet de reproches.
Difficile à déceler
Lors d'un entretien en 2006 au moment de la confirmation de l'enquête du Bureau, le porte-parole de l'ICPP, Carol Montreuil, avait dit ne pas croire les allégations. «J'ai pleinement confiance, étant donné le nombre d'études précédentes, que les allégations de fixation de prix de façon systémique au sein de mes membres, ça n'arrive pas. Ce n'est pas dans nos façons de faire des affaires», avait-il affirmé au Devoir.
Le Bureau a signalé qu'il est extrêmement difficile de «déceler et prouver» des complots de fixation des prix. «Des soupçons et des prix identiques ne suffisent pas pour prouver qu'il y a eu infraction», a-t-il indiqué.
Le Bureau ne pouvait préciser hier quelle somme avait été pigée dans les poches des automobilistes grâce au cartel. Le sous-commissaire adjoint a cependant estimé que, si la surcharge avait été de 1 ¢ le litre dans les quatre territoires visés, la somme totale pour les consommateurs aurait été de deux millions.
La hausse du prix de l'essence depuis quelques années est attribuable à un croisement de facteurs, dont la hausse du cours du pétrole brut que plusieurs expliquent par des pressions spéculatives sur le baril. Notons toutefois que le prix du litre d'essence à la sortie des raffineries canadiennes est en partie déterminé par le cours du gallon d'essence sur le Nymex, à New York.
Réactions
L'annonce du Bureau de la concurrence a suscité des réactions chez plusieurs organismes syndicaux ou groupes de consommateurs qui demandaient une enquête plus large, des pouvoirs plus lourds pour le Bureau de la concurrence, etc.
Le Bloc québécois a tenu à rappeler hier la pertinence de son projet de loi C-454, qui vise à donner au Bureau de la concurrence des pouvoirs élargis de manière à ce qu'il scrute notamment les activités dans le secteur du raffinage.
À Québec, l'ADQ s'étonnait du fait que le complot ait été découvert à Ottawa, et non au Québec.
«Ç'a pris un bureau fédéral pour régler un problème au Québec, alors qu'on a une Régie de l'énergie au Québec, on a un ministre des Ressources naturelles, on a un gouvernement libéral qui dit vouloir protéger les consommateurs», a dit le député de Chambly, Richard Merlini. «Et qu'est-ce qu'on a aujourd'hui? Un bureau fédéral qui a trouvé le problème et qui dépose des accusations criminelles. La Régie sert à quoi?»
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Avec la collaboration de Gérard Bérubé Cousine Volcan | |
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